Les voitures concepts ne sont pas destinées à la production mais annoncent plutôt les toutes dernières technologies des constructeurs ou les lignes futures d’une marque. Et celle qui est considérée comme le premier vrai concept fut la Buick Y-Job, en 1938.
Avant la Y-Job, les constructeurs fabriquaient des voitures concepts mais elles n’étaient jamais montrées en public. Vers la fin des années 1930, Harley Earl, vice-président du département Styling Section de General Motors (auparavant appelé Art and Colour Section) et visionnaire à temps plein, veut tester auprès du public les lignes qu’il a en tête pour les voitures des prochaines années.
Earl prend le châssis d’une Buick 50 et l’allonge jusqu’à 126,75 pouces. Le moteur est un huit cylindres en ligne de 320 pouces cubes développant 141 chevaux, une très grosse écurie pour l’époque. La transmission manuelle à trois rapports expédie la cavalerie aux roues arrière, comme c’était de mise il y a 80 ans.
La Y-Job a vu le jour en 1938. Pourquoi Y? Pour deux raisons. Tout d’abord, les modèles expérimentaux de GM, qui n’étaient pas montrés au public, débutaient par la lettre X. La voiture concept de 1938 poussant le bouchon un peu plus loin, il était normal qu’elle reçoive une lettre plus ‘’élevée’’. Aussi, durant les années d’avant la Seconde Guerre mondiale (1939-1945), les avions expérimentaux portaient la lettre Y. Et comme tout ce qui touchait l’aviation était très populaire à ce moment, le Y était parfaitement justifié.
Notez qu’à l’époque, on ne parlait pas encore de Concept Car. On parlait plutôt de Dream Car, une voiture pour faire rêver. Et la Y-Job qui fait rêver. Tout d’abord, La ligne générale est basse et large et annonce déjà les modèles qui seront populaires dix ans plus tard. Contrairement aux voitures du moment, la Y-Job ne possède pas de marchepieds. Les ailes avant sont beaucoup plus intégrées à la voiture que sur les modèles de production et s’étirent loin dans les portes tout en étant soulignées par des lignes de chrome proéminentes. Idem pour les ailes arrière.
Le toit se rétracte dans le coffre. Les phares se retrouvent derrière de petites portes rondes, les clignotants sont cachés derrière la grille et les feux arrière sont intégrés aux ailes. Le capot est très bombé et préfigure les capots ‘’baignoire’’ des années 40 et 50. De son côté, le pare-brise en V est beaucoup plus incliné que d’habitude. Bref, la Y-Job fait soudainement paraître les modèles 1938 comme des antiquités.
L’habitacle est plus conventionnel mais on y retrouve certaines nouveautés, comme des boutons pour contrôler les différentes fonctions de la voiture, dont les vitres électriques. Le tableau de bord se poursuit dans les portes, une innovation, et la base des essuie-glaces renferme de petits ventilateurs.
Lorsque la carrière ‘’publique’’ de la Y-Job fut terminée, Harley Earl s’en est servi comme voiture personnelle jusque dans les années 40, ajoutant quelque 50 000 milles (80 000 km) à son compteur. Au fil de ses années, elle a été quelque peu modifiée et son moteur a été changé mais la ligne générale n’a jamais été altérée.
Durant les années 50, la Y-Job a été récupérée par la Buick Heritage Collection. Encore aujourd’hui, ce Dream Car mythique est la propriété de General Motors. Inutile de mentionner que sa valeur est inestimable
Cet article a déjà été publié dans le magazine Le Tacot (Voitures anciennes de Granby).